Le président de la République, Macky Sall a présidé, ce lundi, la rentrée solennelle des cours et tribunaux. Sous le thème « Protection des usagers dans le système de santé publique », la rencontre a été une occasion pour le président de la République d’annoncer un programme de construction de 69 infrastructures judiciaires pour la période 2023-2027, d’un montant 250 milliards de FCFA dont les travaux démarrent cette année. « La construction de huit infrastructures de la justice, notamment des cours et tribunaux ainsi que des établissements pénitenciers », a fait savoir le chef de l’Etat.
Le président de la République a aussi annoncé le démarrage, cette année, des chantiers des hôpitaux de Tivaouane, Mbour, Saint Louis et Ourossogui.
Il a également réaffirmé le projet du gouvernement de reconstruire l’hôpital Principal de Dakar (niveau quatre), celui de Le Dantec (niveau 4) et la construction d’un établissement pour le traitement des cancers à Diamniadio.
Appelant à une meilleure organisation du système de santé, Macky Sall a prôné la mise en place des contrats de performance et une meilleure relation les hôpitaux et les universités du pays.
Une réflexion saine et sereine pour un système de santé performant
Le chef de l’Etat Macky Sall a appelé à engager une réflexion saine et sereine afin de mieux organiser et rendre plus performant le système de santé sénégalais.
« Nous devons engager une réflexion saine et sereine sur la problématique touchant le système de la santé. Les évènements malheureux survenus dans nos structures de santé, il y a quelques temps en constituent une douloureuse illustration », a-t-il dit, faisant allusion aux cas de décès de femmes en couches et de bébés dans les structures sanitaires.
Macky Sall estime qu’il faut « mieux organiser » le système de santé sénégalais afin de le rendre « plus performant » et relever « ses résultats à la hauteur des investissements » consentis par l’Etat dans le secteur.
Il a également souligné la nécessité de « reformer et améliorer la gouvernance du système de la santé » par la digitalisation intégrale, la mise en place de contrat de performance et la révision de la convention hospitalo-universitaire.
Sur ces questions, Macky Sall a annoncé que le ministère de la Santé et de l’Action sociale fera le point sur ces dossiers dans les prochains jours.
Le président de la République a précisé que le thème de cette rentrée solennelle des cours et tribunaux n’a pas pour but d’« instruire un procès d’intention, encore moins un réquisitoire à charge sur le système sanitaire. »
Il a déclaré que « la finalité » de cet exercice « est de rappeler à notre conscience collective la nécessité de la responsabilité de sauvegarder les droits et intérêts des usagers du système de santé publique et privé. »
Aussi, il a souligné l’importance de faire « justice » à des hauts fonctionnaires les mieux qualifiés de la République avec au moins 25 années de formation « pour avoir pleinement pris conscience de leur sacrifice au péril de leur vie. »
Le déficit de confiance à l’égard de l’institution judiciaire déploré
Le bâtonnier de l’ordre des avocats du Sénégal, Me Mamadou Seck, a déploré, le déficit de confiance et la défiance des citoyens à l’égard de la justice, une situation qui selon lui jette le soupçon sur l’institution judiciaire.
« Notre justice n’a pas été épargnée ces derniers temps, où nous avons été témoins plus généralement d’une confrontation entre les institutions et les citoyens, dont les formes comme les raisons ont pu laisser perplexes certains », a relevé Me Seck.
Selon lui, « quand les réseaux sociaux cherchent à s’imposer au droit et à la justice, quand le principe même d’autorité est rejeté, (…) quand les décisions sont aussitôt contestées voire vilipendées, les acteurs de la justice sont interpellés au plus haut point. »
Le bâtonnier de l’ordre des avocats considère que « le déficit de confiance et la défiance des citoyens à l’égard de leur justice jettent de façon dommageable le soupçon sur une institution qui ne le mérite pas et qui doit être respectée. »
Dans cette perspective Mamadou Seck souligne que la justice doit être « protégée, défendue par ceux qui l’animent et qu’elle transcende, pour être la plus parfaite possible. »
Il constate que l’affaiblissement de l’autorité judiciaire procède certes de l’état d’esprit de certains citoyens, mais il est aussi « entretenu de l’intérieur de l’institution par certains […] comportements. »
« Les acteurs de la justice doivent être irréprochables, les magistrats exerçant leur magistère avec indépendance et impartialité et les avocats assurant la défense dans la dignité, l’honneur, le courage et en toute indépendance », martèle-t-il.
Poursuivant son argumentaire, le bâtonnier de l’ordre des avocats invite ses confrères à « rompre » avec « la culture collective », consistant à « observer une attitude plutôt pudique à l’égard des comportements individuels inadaptés, déviants ou non conformes à nos règles car c’est l’affaire de l’institution judiciaire toute entière, laquelle pâtit dans son ensemble de la mauvaise image que certains d’entre nous donnent de la justice. »
S’adressant aux justiciables qui ont « le droit de demander des comptes », l’avocat rappelle qu’ils doivent toutefois « bannir tout comportement qui entrave le bon fonctionnement de la justice qui n’est pas un service public comme un autre, mais (…) le régulateur de l’Etat de droit. »
Les limites de la législation sur la santé publique soulignées
Le Procureur général près la Cour suprême, Mahamadou Mansour Mbaye a déploré, lundi à Dakar, les limites notées dans la législation en matière de protection des usagers du système de santé publique ainsi que l’absence d’un Code de la santé.
« Nous voudrions relever que, comme toute œuvre humaine, notre législation en matière de protection des usagers du système de santé publique a révélé des limites. Il est à déplorer notamment qu’en l’absence d’un Code de la santé publique, certains principes fondamentaux d’un système de santé publique ne soient consacrés en droit sénégalais que dans la Charte du malade qui procède d’un arrêté », a-t-il dit.
Toutefois, il a reconnu que « la législation a atteint certains des objectifs qu’elle s’est assignée en prenant acte de mutations importantes dans la relation entre les patients et le système de santé et en ouvrant la voie à des évolutions majeures de nos structures sanitaires. »
Cette législation a consacré « de nouveaux droits pour les patients et jeté les bases de rapports de considération et de respect entre malades et médecins ». a-t-il souligné.
Le Procureur général a invité le pouvoir judiciaire « à trouver le meilleur équilibre », dans l’application de cette loi, « entre les droits des personnes malades et les devoirs des professionnels de santé (…) ou enfin entre les exigences de la responsabilité et celles de la solidarité. »
Il a souligné la nécessité d’aller vers « une plus grande démocratie sanitaire et une meilleure réparation des préjudices » ainsi que « l’effectivité de l’égal accès à des soins de qualité. »
Selon lui, « la réforme majeure entreprise en 1998 » pour améliorer les performances des hôpitaux sur le plan de la gestion et de la qualité des soins «a fixé un point d’équilibre entre les exigences et impatiences de la société et les formidables progrès accomplis ces dernières décennies par la médecine. »
Pour le Procureur général, ces progrès scientifiques, techniques et médicaux «vont de pair avec la prise en compte de l’autonomie et de l’émancipation, des personnes. »
Mahamadou Mansour Mbaye a insisté sur l’instauration « de principes de responsabilité, plus souples et non stigmatisant » ainsi que la promotion de « la démocratie sanitaire », avec une représentation collective des patients et une meilleure prise en compte des droits des personnes malades.